“Ce phenomene important a l’histoire des montagnes, je veux dire ces intersections des filons, est tres frequent dans les mines et tres remarque par les mineurs. Il arrive souvent que des filons, qui sont a la meme heure, c’est-a-dire, qui ont des directions semblables vers l’horizon, ont une chute ou inclinaison differente, et telle que leurs deux plans se coupent a une certaine profondeur. Si le mineur ne s’en appercoit pas assez tot, et que des le commencement de son exploitation, il n’etanconne pas fortement partout ou il enleve les filons, tout son ouvrage peut etre ecrase par l’enfoncement de la piece qui les separoit. Cette piece meme a un nom chez le mineurs; ils la nomment Bergkiel, c’est-a-dire coin de la matiere de la montagne: et quand deux filons sont voisins l’une de l’autre, le geometre souterrain en etudie l’inclinaison pour juger a l’avance s’il y aura un Bergkiel; et qu’en ce cas la mineur prenne ses precautions, en conservant des appuis naturels dans la gangue, ou s’en faisant d’artificiels, a mesure qu’il s’enfonce. Or si, en elevant les filons, ce coin se trouve sans appui; comment s’est-il soutenu avant que les filons fussent formes?
“Voila une question forte embarrassante. Mais peut-etre n’a-t-on pas fait assez d’attention jusqu’ici a la mauvaise gangue, qui se trouve etre de la meme nature que la montagne. Peut-etre trouveroit on par la, qu’en meme tems que les fentes se font faites, il y est tombe des pieces des cotes, qui ont empeche la reunion des parties de la montagne; fragmens qui, aujourd’hui, font partie des filons, et qu’on pourroit laisser encore pour appuis naturels, n’exploitant qu’autour d’eux lorsqu’on auroit appris a les connoitre.
“Ce peu d’inclinaison des filons du Rammelsberg rappelleroit l’idee des couches formees de depots successifs, s’ils etoient paralleles. Mais leur manque de parallelisme en tout sens exclut cette explication. Car dans toutes les montagnes qui doivent leur formation aux depots des eaux, les couches sont paralleles; et l’on sent bien qu’elles doivent l’etre.
“La nature des filons du Rammelsberg est aussi differente de celle de Claustbat que l’est leur situation. C’est un massif compacte, et presque partout le meme, de mineral de plomb et argent pauvre, penetre de pyrite sulphureuse. Ils sont traverses en plusieurs endroits par de Ruscheln, qui ont fait glisser le toit vers le mur; tellement que malgre l’epaisseur de ces filons, on crut une fois en avoir trouve la fin. Ils sont aussi coupes dans leur interieur, en sens differens, par d’autres plus petits filons, composes de matieres tres differentes; surtout d’une pyrite cuivreuse dure et pauvre, et que par cette raison on ne tente pas de separer.
“En mettant a part ces petits filons particuliers, ainsi que les Ruscheln, dus probablement les uns et les autres a des causes posterieures a celles qui ont produit les filons principaux, la masse compacte de ceux-ci reveille beaucoup l’idee d’une matiere fondue; en meme tems qu’on seroit fort embarrasse a concevoir, d’ou viendroit cette matiere, si distincte de toute autre, lorsqu’on voudroit l’attribuer a l’eau.