SCENE III.
SILVIA, DORANTE, MARIO.
MARIO.
Ah! te voila, Lisette?
SILVIA.
Qu’avez-vous, Monsieur? vous me paroissez emu.
MARIO.
Ce n’est rien: je disois un mot a Bourguignon.
SILVIA.
Il est triste: est-ce que vous le querelliez?
DORANTE.
Monsieur m’apprend qu’il vous aime, Lisette...
SILVIA.
Ce n’est pas ma faute.
DORANTE.
Et me defend de vous aimer.
SILVIA.
Il me defend donc de vous paroitre aimable?
MARIO.
Je ne saurais empecher qu’il ne t’aime, belle Lisette; mais je ne veux pas qu’il te le dise.
SILVIA.
Il ne me le dit plus, il ne fait que me le repeter.
MARIO.
Du moins ne te le repetera-t-il pas quand je serai
present. Retirez-vous,
Bourguignon.
DORANTE.
J’attends qu’elle me l’ordonne.
MARIO.
Encore!
SILVIA.
Il dit qu’il attend: ayez donc patience.
DORANTE.
Avez-vous de l’inclination pour Monsieur?
SILVIA.
Quoi! de l’amour? Oh! je crois qu’il ne sera pas necessaire qu’on me le defende.
DORANTE.
Ne me trompez-vous pas?
MARIO.
En verite, je joue ici un joli personnage! Qu’il sorte donc! A qui est-ce que je parle?
DORANTE.
A Bourguignon, voila tout.
MARIO.
Eh bien! qu’il s’en aille!
DORANTE, a part.
Je souffre.
SILVIA.
Cedez, puisqu’il se fache.
DORANTE, bas a Silvia.
Vous ne demandez peut-etre pas mieux?
MARIO.
Allons, finissons.
DORANTE.
Vous ne m’aviez pas dit cet amour-la, Lisette.
SCENE IV.
M. ORGON, MARIO, SILVIA.
SILVIA.
Si je n’aimois pas cet homme-la, avouons que je serois bien ingrate.
MARIO, riant.
Ha! ha! ha! ha!
M. ORGON.
De quoi riez-vous, Mario?
MARIO.
De la colere de Dorante, qui sort, et que j’ai oblige de quitter Lisette.
SILVIA.
Mais que vous a-t-il dit dans le petit entretien que vous avez eu tete a tete avec lui?
MARIO.
Je n’ai jamais vu d’homme ni plus intrigue ni de plus mauvaise humeur.
M. ORGON.
Je ne suis pas fache qu’il soit la dupe de son propre stratageme; et d’ailleurs, a le bien prendre,[197] il n’y a rien de plus flatteur ni de plus obligeant pour lui que tout ce que tu as fait jusqu’ici, ma fille. Mais en voila assez.
MARIO.
Mais ou en est-il precisement, ma soeur?