Et le marquis, parlant aux femmes, leur
prenait
Les vetements des mains.
—Laissez,
que je l’habille!
Oh! quand sa mere etait toute petite fille,
Et que j’etais deja barbe grise,
elle avait
Coutume de venir des l’aube a mon
chevet;
Parfois, elle voulait m’attacher
mon epee,
Et, de la durete d’une boucle occupee,
Ou se piquant les doigts aux clous du
ceinturon,
Elle riait. C’etait le temps
ou mon clairon
Sonnait superbement a travers l’Italie.
Ma fille est maintenant sous terre, et
nous oublie.
D’ou vient qu’elle a quitte
sa tache, o dure loi!
Et qu’elle dort deja quand je veille
encor, moi?
La fille qui grandit sans la mere, chancelle.
Oh! c’est triste, et je hais la
mort. Pourquoi prend-elle
Cette jeune epousee et non mes pas tremblants?
Pourquoi ces cheveux noirs et non mes
cheveux blancs?
Et, pleurant, il offrait a l’enfant des dragees.
—Les choses ne sont pas ainsi
bien arrangees;
Celui qui fait le choix se trompe; il
serait mieux
Que l’enfant eut la mere et la tombe
le vieux.
Mais de la mere au moins il sied qu’on
se souvienne;
Et, puisqu’elle a ma place, helas!
je prends la sienne.
—Vois donc le beau soleil et
les fleurs dans les pres!
C’est par un jour pareil, les Grecs
etant rentres
Dans Smyrne, le plus grand de leurs ports
maritimes,
Que, le bailli de Rhode et moi, nous les
battimes.
Mais regarde-moi donc tous ces beaux jouets-la!
Vois ce reitre, on dirait un archer d’Attila.
Mais c’est qu’il est vetu
de soie et non de serge!
Et le chapeau d’argent de cette
sainte Vierge!
Et ce bonhomme en or! Ce n’est
pas tres hideux.
Mais comme nous allons jouer demain tous
deux!
Si ta mere etait la, qu’elle serait
contente!
Ah! quand on est enfant, ce qui plait,
ce qui tente,
C’est un hochet qui sonne un moment
dans la main,
Peu de chose le soir et rien le lendemain;
Plus tard, on a le gout des soldats veritables,
Des palefrois battant du pied dans les
etables,
Des drapeaux, des buccins jetant de longs
eclats,
Des camps, et c’est toujours la
meme chose, helas!
Sinon qu’alors on a du sang a ses
chimeres.
Tout est vain. C’est egal,
je plains les pauvres meres
Qui laissent leurs enfants derriere elles
ainsi—
Ainsi parlait l’aieul, l’oeil
de pleurs obscurci,
Souriant cependant, car telle est l’ombre
humaine.
Tout a l’ajustement de son ange
de reine,
Il habillait l’enfant, et, tandis
qu’a genoux
Les servantes chaussaient ces pieds charmants
et doux
Et, les parfumant d’ambre, en lavaient
la poussiere,
Il nouait gauchement la petite brassiere,
Ayant plus d’habitude aux chemises
d’acier.
IX
JOIE HORS DU CHATEAU