A n’entendre parler que de politique, les enfants memes se troublaient “Maman,” demandait la fille d’un whig eminent; “les tories naissent-ils mechants, ou bien le deviennent-ils?” “Ils naissent mechants,” repliqua la mere, “et deviennent pires....’ Une vieille fille excentrique, que l’auteur a connue, ne consentait a monter dans une voiture de louage qu’apres avoir demande au cocher s’il n’avait point transporte de malades atteints d’une maladie infectieuse, s’il n’etait pas puseyite, et enfin s’il adherait au programme whig.
“La passion aveugle,” dit Topffer: elle aveuglait sur la moralite des procedes. Pitt, en visite chez une femme qui occupait un rang eleve dans le monde whig, au moment d’une election, dit a son interlocutrice: “Eh bien! vous savez, nous l’emporterons. Dix mille guinees partiront demain par un homme de confiance pour le Yorkshire, et c’est pour notre usage qu’elles partent.” “Du diable s’il en est ainsi,” replique la dame. Et la nuit meme le porteur etait arrete, et son precieux fardeau allait grossir les poches des electeurs qui voterent pour le candidat whig et en assurerent la nomination.
C’est au cours de ces luttes politiques, pleines de feu et glorieuses, qui marquerent principalement le debut de ce siecle, et firent tant de bien a la nation, que les barrieres entre les castes commencerent a s’abaisser. Jusque-la, il n’y avait point de rapports entre l’aristocratie et la classe moyenne, en dehors des cas, encore rares, ou la premiere patronnait l’aristocratie intellectuelle. (Voyez La Vie de Johnson par Boswell, par exemple.)